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"Car finalement j'ai encore quelque chose à dire ..."
Bruno Baudrillart - avant-propos de "Bribes"
Carte postale, réalisée en prison par Bruno Baudrillart
pour contourner l'interdiction de communiquer
"La génération des soixante-huitards a produit des femmes et des hommes de communication, et non des moindres, des "communicants en chef" et, même parmi eux, après un long séjour dans une cellule crasseuse de Rimini, en Bolivie, l'inventeur de la médiologie, ou encore tel ancien membre d'un groupe armé, aujourd'hui Directeur de l'école de guerre économique. C'est dire. Ils déjeunent ensemble à la cantine du Monde, chez Lipp, à la Closerie des Lilas ou bien ailleurs. D'autres encore sont patrons de presse, observateurs autorisés de la conflictualité sociale, sociologues, politologues, politiciens, DRH de grandes entreprises, voire sénateurs, bons à rien et prêt à tout, commentateurs bavards mais souvent inaudibles et enfants de Mc Luhan, prophètes aphones dans le désert de la pensée unique.
Pour ma part, comme mes camarades, je ne connaissais pas la rue Sebastien-Bottin, mais l'avenue de la Division Leclerc, devenue depuis allée des Thuyas (certains pères demandaient à leurs filles de leur écrire "à l'hôpital de Fresnes", ça faisait moins coupable, en tous cas moins honteux). Il est vrai que la plupart d'entre nous avons appris à penser, à nous exprimer, à parler, à écrire à cette école-là plus que rue d'Ulm. Le gauchisme fut notre université. Après un détour par la Nouvelle résistance populaire, la guerre de classes, les actions antifascistes ou anti-impérialistes, "saluées" ironiquement par des organisations légales, ou le féminisme - c'est selon -, beaucoup sont revenus au service de leur classe d'origine, fort naturellement et, sans qu'il y ait d'ailleurs lieu de s'en offusquer, utilisent leur avoir acquis ailleurs au service de leurs nouvelles fonctions. Tout est dans l'ordre. Elles et ils dirigent des collections dans des maisons d'édition, selon leur spécialité cultivée sur les chemins broussailleux, mais ô combien enrichissants de la révolte. Un grand nombre d'entre nous, ouvriers d'extraction, d'effraction et d'infraction avons pris goût à la parole, quoique retenue et souvent modeste. Pourquoi nous taire? Il nous arrive donc de nous servir du savoir humain, intellectuel et politique appris durant cette première période.
Aujourd'hui, quelques decennies plus tard j'ai un sentiment de pas fini, le sentiment que le discours n'est pas clos. J'ai envie de contester ce monopole aux mandarins, car finalement j'ai encore quelque chose à dire, non pour disputer une portion du terrain à la valeur marchande mais pour approcher au plus près de la réalité.
Car plus de vingt ans ont passé. Il y a désormais prescription. Je peux parler de mon histoire comme je l'ai vécue. Qu'on me le pardonne, ainsi que la singulière maladresse qui l'accompagne inévitablement. Je ne m'intéresserai ni au nom des protagonistes, ni aux détails scabreux. Je voudrais simplement rendre compte d'une époque, celle où l'histoire, selon l'heureuse formule de Daniel Jebrac, nous montrait véritablement la nuque.
Il me reste alors à raconter les chemin de traverse que j'ai empruntés, les rencontres heureuses ou malheureuses, que j'y ai faites, les acquis et les reculs, les rires et les joies, les pleurs et les douleurs qui ont jalonné nos parcours singuliers, les bribes d'une vie."
Les camarades qui connaissent linter ou qui visitent régulièrement le blog connaissent Bruno Baudrillart. Partie prenante de l'Internationale, il avait fait partie des arrêtés de décembre 1984. Ses cartes postales réalisées en prison, pour détourner l'interdiction de communiquer, sont un témoignage unique de sensibilité révolutionnaire, que le blog ne se lasse pas de reprendre. Elles sont sans aucun aucun doute un document majeur qui reste à éditer.
Les dernières années de sa vie, Bruno Baudrillart les a passées au Pays basque, et il a gardé jusqu'à sa disparition une profonde conscience de classe et volonté de lutte. Il était là à l'hommage pour Joëlle Aubron au Père Lachaise. A son décès, linter lui a rendu hommage avec les termes qui pour nous le définissaient le mieux: "un communisme vécu".
Lui-même avait choisi pour parler de lui cette phrase, qui nous le rend si proche et si présent:, qui pourrait être reprise par chacun des militants ayant participé à l'Internationale et placée en exergue de ce blog:
"De moi, je veux que l'on ne conserve que le souvenir du militant, communiste, révolutionnaire, internationaliste, que j'ai tant bien que mal essayé d'être durant toute ma vie, avec ses richesses et ses erreurs."
Bruno a laissé des notes, le début d'un livre, d'un projet qu'il n'a pu mener à son terme. Des amis ont édité ces notes. L'avant-propos ci-dessus est tiré de ce livre, disponible, maintenant et que nous pouvons faire parvenir à ceux qui nous le demanderons et à ceux qui souhaiteraient le distribuer*.
linter
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ESPACE EXPO - La révolution en cartes
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Ils sont emprisonnés, ils s'écrivent et ils écrivent
Ils n'abandonnent pas le combat, Ils discutent et réfléchissent
A l'avenir, un avenir. Oser le combats, mettre le rouge
De la révolution
Ils y ont songé et d'autres y songent encore
Révolution
Un jour peut-être, et le soleil en cadeau ...